Hello, c’est la rentrée !
La rentrée étant synonyme de nouveauté, on a décidé de commencer la saison 5 avec un 4 en 1 : 4 articles en une publication.
Bonne lecture !
#1 – JO 2024ever
La claque.
Et pourtant, on n’avait pas toujours été tendres avec les JO chez les zouzous. Chez tout le monde en réalité. Personne ne s’y attendait.
100 millions de dollars que ça va être l’enfer ! Sauve qui peut !
Tout le monde critiquait cette marée de touristes à venir, des transports en commun étouffants, des tickets au prix inabordable (#eat the rich quand tu nous tiens), cette impréparation face à un événement de rayonnement mondial.
Et pourtant, jamais, semble-t-il, depuis des mois, nous n’avions été autant ensemble. Pour reprendre les mots de Thomas Jolly, et de Sénèque à l’ancienne : « La vie, ce n’est pas d’attendre que l’orage passe, c’est d’apprendre à danser sous la pluie ». Surtout à une époque de vents mauvais.
Ça a commencé avec une cérémonie iconic (à lire en anglais), suivie par pas moins de 24M de téléspectateurs en France, 83% de part d’audience. Fait hyper intéressant mis en avant par Raphaël Llorca, concernant le visionnage de l’ensemble des JO : “À l’heure de l’éclatement des contenus, voilà que nous nous sommes mis à regarder la même chose, au même moment “.
Une unité qui a perduré pendant toute la période des Jeux, avec un climat à la fête, des moments mémorables (cc Simone et Léon) qui ont rendu la capitale désirable en août même pour les Parisiens, et qui ont déclenché chez les déserteurs un immense sentiment de fomo. Comme dirait un certain zouzou : “Il fallait y être”.
La grande question désormais, c’est : comment faire perdurer cet esprit de solidarité et d’inclusion, au delà de la seule période des JOP ? Car nous, on pense que cette parenthèse enchantée ne doit pas, justement, rester une parenthèse. Au contraire, on doit en tirer des enseignements. On a commencé la liste de courses (non exhaustive) des éléments à garder ad vitam eternam pour une société plus humaniste :
- “Levez-vous si vous le pouvez” : systématiser ce genre de choix délicat de mots, dans tous les grands événements publics ou privés, pour garantir l’inclusivité notamment des personnes en situation de handicap.
- Les commentateurs hyper pédagogiques, qui faisaient preuve de médiation pour rendre tous les sports accessibles (même les plus techniques) : à étendre aux autres événements sportifs mais aussi culturels.
- Faire des fans zones, des lieux permettant à TOUS de profiter de manière abordable de tous les sports. Pas juste le football, le rugby et le tennis. Et étendre ces fans zones à plus d’événements culturels/sportifs.
- Des trajets en transport en commun optimisés : les lignes habituellement surchargées ont été largement désengorgées donc essayons de poursuivre dans cette voie-là pour les prochains événements mobilisant beaucoup de monde.
- La diversité des représentations, mais pas opportuniste : sans chercher à en faire un sujet en soi, on peut juste célébrer le collectif
- La mise au sport de toute une nation : continuer de faire la promotion d’un maximum de sports auprès d’un maximum de Français.
Si vous avez d’autres propositions n’hésitez plus, écrivez-nous à anne.hidalgo@mairie-de-paris.fr. Bisous.
#2 – Vivre de dép et d’eau fraîche
« J’adore l’ivresse. Pas l’ivresse l’ivresse, mais j’adore être un peu grise. Le tout début de l’ivresse… C’est un formidable anxiolytique quand même. » Tu as peut-être entendu ces mots, directement de la bouche de Carla Bruni, ou alors de celle de tiktokeurs les reprenant avec un peu d’ironie, comme ils l’auraient fait avec un « On va pas refaire la NUPES hein » ou un « J’y suis Alexis ! Hiiiiiiii ! ».
S’ils se moquent gentiment, c’est en partie parce que boire de l’alcool, c’est en train de devenir un truc de boomer (/milennial…). Eh ouais, les jeunes ne boivent plus autant que leurs aînés. 20% de moins que les millennials à leur âge, et 1/4 des 16-24 ans ne boivent pas du tout.
Alors il y a eu l’effet du covid, qui à court-moyen terme nous a fait perdre l’habitude de sortir, et à plus long terme nous a donné une conscience accrue des risques sanitaires au sens large. Et évidemment c’est plutôt une bonne nouvelle quand on se rappelle que l’alcool tue 50.000 personnes par an en France.
Mais au-delà de ça, la vérité c’est que la perte de contrôle est juste passée de mode.
En fait, dans un contexte d’insécurité économique, écologique, politique et sociale, perdre le contrôle ajoute encore à notre anxiété généralisée (ça va grave mal).
Quand on prend conscience du risque permanent de violences sexistes et sexuelles que courent les meufs juste en existant, on n’a plus envie de perdre le contrôle.
Quand on prend conscience du risque quasi inextricable de bouleversement climatique, on n’a plus envie de perdre le contrôle.
Quand on prend conscience du risque de recul de nos droits sociaux et politiques, on n’a plus envie de perdre le contrôle.
Avec tout ça, on n’a plus vraiment le choix que d’être mature avant l’heure, et de renoncer à l’insouciance, même à 20 ans. Alors on ne revendique pas notre droit à se bourrer la gueule (quoi que), mais au moins celui à avoir une jeunesse. Et pour ça, il faut que tous les sujets qui nous rendent quotidiennement anxieux, deviennent le problème de tout le monde – des gens, des entreprises, des institutions.
#3 – La fake news s’habille en Prada
L’arrestation du patron de Telegram, Pavel Durov, a fait beaucoup de bruit sur la plateforme préférée des pros et des startuppeurs : LinkedIn. Pas mal d’influenceurs ultra-libéraux de la plateforme ont critiqué cette actualité, avec des posts indignés qui défendaient le milliardaire franco-russe. En gros : l’arrestation était une atteinte aux libertés d’entreprendre et d’expression, quasiment digne d’une dictature (toujours plus). Leur raisonnement est bourré de raccourcis, mais surtout, qui sont-ils pour commenter une affaire judiciaire ? Quelle est leur légitimité ?
LinkedIn, c’est censé être the place où on parle business, carrière et innovation. Un endroit où les photos de chats cèdent la place aux posts inspirants sur la réussite professionnelle. So serious… Pourtant, même sur cette plateforme propre sur soi, les fake news et autres infos douteuses trouvent leur chemin. Eh oui. Même ici, la désinformation peut frapper fort, et quand elle le fait, elle a tendance à faire beaucoup de dégâts.
Sur LinkedIn, contrairement à d’autres réseaux sociaux, la crédibilité des influenceurs est quasi automatique. Après tout, ils sont ici pour parler de choses sérieuses, non ? Leur expertise, leurs expériences, tout est bien marketé pour respirer la fiabilité :
- Ils ont le look (coco) : une belle photo LinkedIn comme on aime, la belle cravate, la coiffure. Tout est on fleek.
- Ils roucoulent la langue de Molière : non seulement ils parlent bien, mais en plus ils affirment les choses avec confiance, et même autorité parfois.
- Ils ont gagné leurs épaulettes : sur LinkedIn, il y a une capacité à bien nommer un job et à le mettre en description pour paraître plus expert ou qualifié qu’il ne l’est réellement. Tu dis pas “caissier”, tu dis “Responsable de l’encaissement et des transactions”. Et à cause de ce qu’on appelle le biais d’autorité, on est plus enclin à croire quelqu’un dont la fonction est perçue comme plus experte.
Nos influenceurs maîtrisent parfaitement ce marketing de la crédibilité, et être sur une plateforme consacrée aux professionnels consolide leur statut. Tout ça + quelques biais cognitifs, ça donne : une crédibilité quasiment acquise. On se dit naturellement : « Cette personne sait de quoi elle parle. » Et pourtant…
Une information douteuse bénéficiant de la crédibilité de nos influenceurs peut avoir de gros dégâts sur notre société. Surtout auprès de nos zoomers qui investissent la plateforme pour trouver des stages, alternances et emplois. Les fake news comme celle des punaises de lit, des Dreamer Days de Starbucks, et plus récemment les athlètes olympiques contaminés par l’eau de la Seine, ont largement été partagées sur LinkedIn (leur démenti, beaucoup moins).
Pour éviter de tomber dans leur piège, il faut quand même se souvenir que le fond de commerce des influenceurs, c’est aussi de faire réagir et de faire le buzz, sur LinkedIn comme ailleurs.
#4 – Backlash not very mindful, not very demure
Aujourd’hui on ne parlera pas de carbonara ou de bolognaise, mais bien de la sauce pimenté signée Twitter, celle qui fait bien mal et qui te prend par surprise à chaque fois.
En gros Blake Lively aka Serena de Gossip Girl, aka la reine du Met Gala, aka la femme de Ryan Reynolds s’est faite allumée sur les réseaux sociaux au moment de la sortie du film qu’elle a co-réalisé et dans lequel elle joue, It Ends With Us.
Cette comédie romantique adaptée du roman éponyme, raconte l’histoire de Lily, une trentenaire qui va se battre pour ouvrir son magasin de fleurs et qui, par la même occasion, va rencontrer l’amour. Un film à l’eau de rose en apparence assez classique mais qui sera largement teinté par le sujet des violences conjugales.
C’est au moment de la promotion du film que les choses ont commencé à se corser pour Blake. En quelques jours, l’actrice est passée de la jolie blonde que tout le monde adore à LA mean girl d’Hollywood. Un revirement de situation que l’on doit à un mix de 5 ingrédients :
- Faire la promotion d’un film pourtant assez sombre, de façon légère, et en insistant davantage sur le discours d’indépendance de la femme,
- Encourager les gens à aller voir le film en portant leurs plus « belles robes à fleur »
- Arriver stylée et pimpée aux événements de promo,
- Profiter de la promotion du film pour communiquer sur sa marque de shampoing et d’alcool (pas très délicat on te l’accorde)
- Être une femme.
Une fois que tous ces ingrédients sont bien mélangés tu devrais obtenir une critique complète de toute ta carrière. Tout doit être remis en cause, ta légitimité à exercer cette profession, ton sens de l’éthique, ta personnalité qui, finalement, n’est pas si cool.
En vérité, qu’est ce que nous apprend cette recette ?
Probablement que les gens ont de plus en plus de mal à faire preuve de discernement. Les critiques envers l’actrice sont légitimes, mais ne justifient probablement pas un tel déferlement de haine. Le vrai problème qui se cache derrière ça c’est que les réseaux sociaux nous enferment dans un schéma de pensée. La surcharge d’informations et les biais de confirmation que génèrent les algorithmes ne permettent pas de se forger sa propre opinion et de prendre du recul sur l’ampleur du backlash. On ne voit qu’une seule façade de l’histoire, qui nous est répétée en boucle. On finit par se persuader que la personne mérite de se faire descendre publiquement pour un acte qui n’est finalement pas si grave.
Et dès lors que l’opinion publique se met d’accord sur un jugement, il devient très difficile de ne pas se laisser influencer à penser la même chose (coucou Johnny Depp vs Amber Heard).
Peut-être serait-il temps de remettre le concept de nuance au goût du jour pour éviter de tomber dans une société radicale.